Poésie Poesie / beaux textes

Caméo
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L’imagination nous fait naviguer dans ces flots mystérieux, mais comprendre totalement un poème, c’est le tuer… Un peu

Poesie / beaux textes

Autoportrait (1946)

Le Navire mystique​


Antonin Artaud (1896-1948)

Il se sera perdu le navire archaïque
Aux mers où baigneront mes rêves éperdus,
Et ses immenses mâts se seront confondus
Dans les brouillards d’un ciel de Bible et de Cantiques.

Et ce ne sera pas la Grecque bucolique
Qui doucement jouera parmi les arbres nus ;
Et le Navire Saint n’aura jamais vendu
La très rare denrée aux pays exotiques.

Il ne sait pas les feux des havres de la terre,
Il ne connaît que Dieu, et sans fin, solitaire
Il sépare les flots glorieux de l’Infini.

Le bout de son beaupré plonge dans le mystère ;
Aux pointes de ses mâts tremble toutes les nuits
L’Argent mystique et pur de l’étoile polaire.

Antonin Artaud, acteur de théâtre.
Poesie / beaux textes
 
Caméo
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Envie​

Murièle Camac (contemporaine)

Poesie / beaux textes



Il y a des jours où ça me prend
la poésie
l’envie d’écrire un poème
envie envie envie
je suis là
j’attends des mots un rythme
j’attends un signe du monde
monde indique-moi donc ça
je suis là je cherche
dedans dehors
où est le signe il doit bien y en avoir un
un son un souvenir de rêve un mouvement
j’attends dans le monde le signe
comme la sainte dans sa cellule
attend son ange
ou comme l’enfant sur son pot
attend que ça sorte
c’est sûr ce n’est pas la même chose
si ça vient de l’ange ou de l’intestin
extase ou déjection
m’en fous je veux juste un poème
que ça monte ou que ça descende

Murièle Camac, Regarder vivre, 2016
 
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🦝 Rocket !
Anonyme
Chant de la Vague et de la Montagne...

Imaginez une toile puissante, où une vague gigantesque, une montagne d'eau écumante, se dresse, menaçante et belle. Ses griffes d'écume blanche se tendent vers le ciel, un mouvement figé dans l'instant. Au loin, le Mont Fuji, serein et immuable, observe le tumulte. De frêles embarcations, chargées d'hommes courageux, luttent contre la furie de l'océan.

Les bleus profonds et les blancs écumants dominent, avec des touches de couleurs chaudes dans les coques des navires. On sentirait la force brute de la nature, la fragilité de l'homme face à elle, et une admiration profonde pour la résilience et la beauté du monde.

Comment pourrait s'appeler cette sublime vague et comment serait-elle !?
 
🦝
🦝 Rocket Raccoon
Anonyme
Sous la carapace, le rire acéré,
un génie cynique, jamais brisé.
Il crie, il raille, il ne montre rien,
ce cœur de raton, si peu serein.

Ses yeux brillants, souvent moqueurs,
cachent l'écho de mille douleurs.
Des aiguilles, des chaînes, le labo froid,
où la science oubliait la loi.

Il se souvient de Lylla, de son doux chant,
de Teefs et Floor, un bref instant.
Amis de peine, espoirs envolés,
dans le néant, cruellement effacés.

Il cherche une famille, un vrai foyer,
mais la peur le ronge, fait dérailler.
"Je suis un monstre", murmure-t-il bas,
malgré les rires et les combats.

Pourtant, sous l'armure et les fusils,
il y a l'enfant que le monde a trahi.
Un être fragile, au passé si lourd,
qui rêve de paix et d'un amour pour toujours...
 
Caméo
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Villebramar !​


Jean-Pierre Villebramar ( Contemporain )

Poesie / beaux textes



A Burgos, on fusillait !
A Madrid, on fusillait !
A Barcelone, on dansait !

La nuit tombe. Dans le train du retour, le bourreau replie sa serviette sur ses genoux et
songe.

C’étaient des songes de bourreau !
Il en faut !

Et un bourreau, des fois, ça rêve
Aux fleurs d’orangers d’Aranjuez !

A Burgos, on fusillait !
A Madrid, on fusillait !
A Barcelone, on dansait !

Quand le bourreau s’est endormi,
A Barcelone, c’était fini !

Villebramar
 
💔
💔Sébastian
Anonyme

Villebramar !​


Jean-Pierre Villebramar ( Contemporain )

Voir la pièce jointe 40102


A Burgos, on fusillait !
A Madrid, on fusillait !
A Barcelone, on dansait !

La nuit tombe. Dans le train du retour, le bourreau replie sa serviette sur ses genoux et
songe.

C’étaient des songes de bourreau !
Il en faut !

Et un bourreau, des fois, ça rêve
Aux fleurs d’orangers d’Aranjuez !

A Burgos, on fusillait !
A Madrid, on fusillait !
A Barcelone, on dansait !

Quand le bourreau s’est endormi,
A Barcelone, c’était fini !

Villebramar
L'Espagne découpée...

Un soleil de juillet, brisé par les canons,
L'Espagne se déchire, frères contre frères.
De Madrid à Burgos, le sang sur les pavés,
sous les bombes du ciel, la liberté s'envole.

Franco, l'ombre portée des sombres dictateurs,
contre le chant du peuple, les espoirs éclatés.
Guernica brûle, crie, le monde ferme les yeux,
tandis que l'Axe aiguise, l'URSS jette un sort.

Des brigades ardentes, venues d'autres pays,
pour un idéal pur, l'Antifascisme en tête.
Mais la danse de Barcelone, hélas, s'est tue,
quand le bourreau s'endort, la cause est perdue.

Alors, les chemins de France, l'exode, la frontière,
la "Retirada" amère, le froid et la poussière.
Trois ans de poudre et de larmes, d'héroïsme et de deuil,
un prélude au grand feu qui allait tout consumer.

L'Espagne saigne et tait ses plaies invisibles,
cicatrice profonde d'un avenir volé.
Mais le sang des anciens, vif, coule encore en nos veines... tant que nous serons toujours vivants...(⁠ツ⁠)
 
Lavandière
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« L’albatros », Baudelaire


« Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher. »
 
Lavandière
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« Blessure vue de loin », Philippe Jaccottet


Ah ! le monde est trop beau pour ce sang mal

enveloppé qui toujours cherche en l'homme le moment de

s'échapper!

Celui qui souffre, son regard le brûle et il dit non, il n'est plus amoureux des mouvements de la lumière, il se colle contre la terre, il ne sait plus son nom, sa bouche qui dit non
s'enfonce horriblement en terre.

En moi sont rassemblés les chemins de la

transparence, nous nous rappellerons longtemps nos entretiens

cachés, mais il arrive aussi que soit suspecte la balance et quand je penche, j'entrevois le sol de sang taché.

Il est trop d'or, il est trop d'air dans ce brillant

guêpier pour celui qui s'y penche habillé de mauvais papier. »
 
Lavandière
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« La pluie », extrait du recueil La vraie gloire est ici, de François Cheng

« La pluie chante en nous son retour éternel,

En nous la terre oublieuse retrace son chemin.

Senteur des collines en fête,

Murmure des pêchers en fleur,

Sourire des auvents en larmes,

Tout feu pris toute fumée bue,

Toute chair au sang délivré,

Et tout mot soudain souvenu.

Dans le cœur désert, nous reprenons goutte à goutte

La source que nous avions cédée aux saisons. »

 
✨ Esprit_Lexique
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La Danse du Champ de Tournesols...

Sous l'immense azur, nappe de velours pur,
s'étire un champ d'or, promesse du futur.
Des mille tournesols, géants humbles et fiers,
qui tendent vers la vie leurs visages solaires.

Les rayons du soleil, caresses de lumière,
sur leurs têtes fleuries tracent un doux sentier.
Et le souffle du vent, brise tendre et légère,
les berce en un ballet, mouvement enchanté.

C'est une danse harmonieuse, un murmure d'été,
où chaque fleur pivote, avec dignité.
Leurs magnifiques visages, unanimes et clairs,
suivent la course d'or de l'astre dans les airs.

Du sol à l'horizon, une vague ondulante,
un chant de beauté monte, mélodie éclatante.
Là où le cœur du monde bat en rythme doré,
le champ de tournesols, poème de l'été...E_L...⁠(⁠ツ⁠)
 
Caméo
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Vieille maison​


Nérée Beauchemin (1850-1931)

Ne fut-il pas bâti par quelque duchesse Anne
Ce logis d’ancien noble et de petit seigneur
Qui nous offre, fleuri de grâce paysanne,
Le portique amical de son perron d’honneur!
Le mur n’est pas creusé de la niche à treillage
Où le naïf aïeul plaçait le saint patron,
Mais, suivant la coutume, une pieuse image,
De la porte dévote, orne encore le front.
Comme le buis pascal et la rose bénite,
Pour celui qui l’expose avec dévotion,
L’image, sur le toit que la famille habite
Fait descendre du ciel la bénédiction.
Vieilles maisons! Chacune, ont leur Jésus, leur Vierge,
Leurs saints de confiance et leurs saintes de choix;
Elles aiment offrir le bouquet et le cierge,
L’une, au bon saint Joseph, l’autre, au bon saint François.
Sous l’arche des auvents que spiritualise
Le candide dessin d’un mystique imagier,
Comme on passe et repasse un portique d’église,
Passe et repassera le peuple du foyer.
La bonne duchesse Anne habite l’autre monde;
Si le ciel lui permet un jour de voyager,
Quand elle aura fini le cercle de sa ronde,
Dans quels relais anciens ira-t-elle loger?
Où trouver les vieux murs et les niches votives?
Les traverses en croix du rustique pignon?
Et l’oratoire à jour où messire saint Yves
Éclipsait saint Corneille et son lourd compagnon?
Où la reverrons-nous la douce demeurance?
La maison bienveillante, ouverte au bon passant,
Qui va donner le gîte à la dame de France,
Et pleurer de tendresse en la reconnaissant?
Duchesse, arrête ici! La maison canadienne,
Toute vibrante aux sons des clochers d’alentour,
Des morts et des absents de la lignée ancienne,
Semble, comme en prière, attendre le retour.
Malgré l’âge et les deuils, elle fait bon visage.
La vitre, tout le jour, a des reflets très doux;
Et, tout le jour, la porte offre un royal passage.
Duchesse, entrez! Soyez céans comme chez vous.
Que l’hôte cordial se lève de sa chaise,
Et, que l’hôtesse, avec la cousine des rois,
Déclare parenté catholique et française,
Par le sang, par le coeur, par l’âme d’autrefois.

Nérée Beauchemin, Patrie Intime
 
Caméo
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Vers la mer​


Émile Verhaeren (1855-1916)

Comme des objets frêles,
Les vaisseaux blancs semblent posés
Sur la mer éternelle.
Le vent futile et pur n’est que baisers ;
Et les écumes,
Qui doucement échouent
Contre les proues,
Ne sont que plumes ;
Il fait dimanche sur la mer !
Telles des dames
Passent, au ciel ou vers les plages,
Voilures et nuages :
Il fait dimanche sur la mer ;
Et l’on voit luire, au loin, des rames,
Barres de prismes sur la mer.
Fier de moi-même et de cette heure
Qui scintillait en grappes de joyaux
Translucides sur l’eau,
J’ai crié vêrs l’espace et sa splendeur :
» Ô mer de luxe frais et de moires fleuries,
Où le mouvant et vaste été
Marie
Sa force à la douceur et la limpidité ;
Mer de clarté et de conquête,
Où voyagent, de crête en crête,
Sur les vagues qu’elles irisent,
Les brises ;
Mer de beauté sonore et de vives merveilles,
Dont la rumeur bruit à mes oreilles
Depuis qu’enfant j’imaginais les grèves bleues
Où l’Ourse et le Centaure et le Lion des cieux
Venaient boire, le soir,
Là-bas, très loin, à l’autre bout du monde ;
Ô mer, qui fus ma jeunesse cabrée,
Ainsi que tes marées
Vers les dunes aux mille crêtes,
Accueille-moi, ce jour, où les eaux sont en fête !
J’aurai vécu, l’âme élargie,
Sous les visages clairs, profonds, certains
Qui regardent, du haut des horizons lointains,
Surgir, vers leur splendeur, mon énergie.
J’aurai senti les flux
Unanimes des choses
Me charrier en leurs métamorphoses
Et m’emporter, dans leur reflux.
J’aurai vécu le mont, le bois, la terre ;
J’aurai versé le sang des dieux dans mes artères ;
J’aurai brandi, comme un glaive exalté,
Vers mon devoir, ma volonté ;
Et maintenant c’est sur tes bords, ô mer suprême,
Où tout se renouvelle, où tout se reproduit,
Après s’être disjoint, après s’être détruit,
Que je reviens pour qu’on y sème
Cet univers qui fut moi-même.
L’ombre se fait en moi ; l’âge s’étend
Comme une ornière autour du champ
Qui fut ma force en fleur et ma vaillance.
Plus n’est ferme toujours ni hautaine ma lance ;
L’arbre de mon orgueil reverdit moins souvent
Et son feuillage boit moins largement le vent
Qui passe en ouragan sur les forêts humaines. Ô mer,
Je sens tarir les sources, dans mes plaines,
Mais j’ai recours à toi pour l’exalter,
Une fois encor,
Et le grandir et le transfigurer,
Mon corps,
En attendant qu’on t’apporte sa mort,
Pour à jamais la dissoudre en ta vie.
Alors,
Ô mer, tu me perdras en tes furies
De renaissance et de fécondité ;
Tu rouleras en tes ombres et tes lumières
Ma pourriture et ma poussière ;
Tu voileras sous ta beauté
Toute ma cendre et tout mon deuil ;
J’aurai l’immensité des forces pour cercueil
Et leur travail obscur et leur ardeur occulte ;
Mon être entier sera perdu, sera fondu,
Dans le bassin géant de leurs tumultes,
Mais renaîtra, après mille et mille ans,
Vierge et divin, sauvage et clair et frissonnant,
Amas subtil de matière qui pense,
Moment nouveau de conscience,
Flamme nouvelle de clarté,
Dans les yeux d’or de l’immobile éternité ! «
Comme de lumineux tombeaux,
Les vaisseaux blancs semblent posés,
De loin en loin, sur les plaines des eaux.
Le vent subtil n’est que baisers ;
Et les écumes,
Qui doucement échouent
Contre les proues,
Ne sont que plumes :
Il fait dimanche sur la mer !

Émile Verhaeren, Les visages de la vie
 

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