À Douarnenez, les pêcheurs excédés par les débordements sur le port de nuit
REPORTAGE. Depuis deux ans, à Douarnenez, le rendez-vous nocturne des pêcheurs à la ligne a changé de visage : jusqu’à 200 Comoriens viennent y faire leur business.
Il paraît qu'on est encore chez nous, mais je dis non !
C'est toute une culture qui vole en éclat, bien sûr je parle de la notre, pas de la leur !Il est 19h30 au Rosmeur, dans le port de Douarnenez (Finistère), et Jacques s’affaire à ranger ses cannes à pêche. Ce sexagénaire passionné lance sa mouche ici, dans ce lieu appelé le « mur de la honte », depuis qu’il a 6 ans. Toute la nuit, installé dans son fauteuil de camping orange et entouré de quelques amis. Ce plaisir était une incongruité tolérée : partout ailleurs, en France, la pêche de plaisir est interdite du coucher au lever du soleil. Les Douarnenistes étaient toujours passés entre les gouttes : « C’était une sorte d’accord tacite, nous avions la possibilité de pêcher contre une bonne conduite », explicite Bernard Lozachmeur, sexagénaire, président de l’Amicale des plaisanciers du Rosmeur. Il précise que cette bonne conduite « allait de soi », tout en se remémorant ses souvenirs de « gamin » à ce même endroit.
Business et guerre de territoire
Ce petit privilège, chéri de génération en génération, a subi un coup d’arrêt il y a cinq mois. La cause ? De nouveaux pêcheurs ont brisé l’accord de bonne conduite. Le lieu, réputé pour être particulièrement poissonneux, regorge de maquereaux certains jours, surtout l’été. « Ça s’est su et c’est devenu un business pour certains », glisse Jacques. « Certains », ce sont « surtout des Comoriens, qui viennent par dizaines. Nous en avons vu arriver jusqu’à 200 ou 300 ces deux derniers étés ». Alors que les habitués pêchent une quinzaine de poissons, pour usage familial, « eux remplissent des glacières entières, repartent avec 100, 200 poissons, et les revendent », explique-t-il. « J’ai vu des annonces : maquereaux du Rosmeur, 1 euro le kilo », assure un restaurateur. Les autres ports étant fermés, ils viennent « en famille, de loin, parfois même d’Angers ou de Lorient, assure Richard, ancien matelot. Les “chefs” arrivent, téléphones autour du cou, et passent les coups de fil pour la vente en direct ». Les poissons sont vidés à même le sol, les viscères laissés sur place, contre toute règle d’hygiène. Même la violence s’est invitée : qui dit business dit guerres de territoires. Et les locaux ont assisté à des rixes entre groupes jaloux de leur bout de terrain. « Quand on est face à quelqu’un muni d’une machette, ça dissuade, explicite un local. Un papi ne s’y risque plus les soirs où les maquereaux abondent. »
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